Interview Natalia Vazquez Riveiros, paléocéanographe

Natalia Vazquez Riveiros, chercheuse. Crédit: Anaïs Duhayon.

Natalia est chercheuse en paléoocéanographie et paléoclimatologie à l’Ifremer au sein du laboratoire Geo-ocean. Pour cette campagne Amaryllis elle est cheffe du quart 0-4.

Quel est ton sujet de recherche principal ?

Je travaille sur des carottes de sédiments marins pour reconstruire le climat du dernier million d’années. Les outils que j’utilise sont les foraminifères, ces micros fossiles à coquille calcaires qui vivent soit à la surface de l’océan soit au fond. Ils fabriquent leur coquille en équilibre avec l’eau qui les entoure. On peut donc les récupérer dans les carottes que nous remontons à bord, les dater, analyser les différentiations chimiques afin qu’ils nous livrent les informations détenues dans leur coquille. Par exemple l’une des choses que l’on analyse c’est le rapport magnésium / calcium : plus les eaux sont chaudes plus les coquilles incorporent du magnésium. Comme on peut mesurer ce rapport dans les eaux actuelles, on peut faire ce que l’on appelle une “calibration” et connaitre ainsi la température de l’eau au moment où vivaient ces foraminifères.

Sur quelle période travailles-tu en priorité ?

Surtout avec des périodes proches analogues à la nôtre : J’ai commencé ma thèse avec la période interglaciaire datée d’il y a 400 000 ans avec des caractéristiques comme le CO2 dans l’atmosphère ou des températures très similaires à celles d’aujourd’hui. Mais la position du soleil par rapport à la terre n’était pas la même. Je voudrais donc comprendre comment la machine climatique fonctionnait à ce moment là pour faire la comparaison avec notre époque où l’homme joue un rôle prépondérant. Mais bon, la machine est très complexe, à chaque fois que l’on trouve des réponses d’autres questions surgissent !

Tu vas utiliser des carottes prélevées sur cette campagne ?

Je travaille beaucoup sur les hautes latitudes avec des carottes de l’Atlantique sud notamment mais il y a une connexion directe avec les eaux du Brésil, donc oui je compte bien travailler avec.

Je dois ajouter que c’est vraiment bien de participer à ces campagnes car on comprend ce que cela implique d’avoir ces échantillons sur lesquels on va travailler ensuite.  Beaucoup parmi nous passent beaucoup de temps derrière les ordinateurs pour leurs recherches, ou bien nous travaillons en laboratoire, on a besoin d’une carotte, on va se servir à la carothèque et voilà ! Ici, on prend conscience du caractère précieux des échantillons, de ce que cela signifie de les récupérer depuis la conception de la campagne il y a 7 ans jusqu’aux moyens mis en œuvre aujourd’hui.

Tu as une bonne expérience des campagnes, qu’est-ce que tu apprécies le plus ?

Déjà c’est dans mon contrat avec l’Ifremer, je suis sensée être disponible pour embarquer. Ça tombe bien, j’aime beaucoup ça ! J’aime le fait de faire des choses complètement différentes, d’être coupée du monde, et de découvrir d’autres facettes des gens dans ce huis clos qu’est une campagne.

Aujourd’hui tu es cheffe de quart, tu as été cheffe de mission également ?

Oui et c’est très différent, le chef de quart passe du temps sur le pont et fais le lien entre les équipes et les chefs de mission, il essaie de ne pas déranger les chefs de mission pour des détails. Cheffe de mission c’est bien différent, tu as une vision bien plus globale de la campagne, il y aussi plus de pression si les choses ne se passent pas comme prévu, si le terrain n’est pas aussi intéressant que ce que l’on pensait par exemple, il faut s’adapter et changer de carottier, faire des choix importants.

Tu as vécu dans des pays différents, Canada, France. Est-ce qu’il y a une chose qui te manque de l’Espagne ?

Une chose qui est unique chez nous : Être dehors avec les gens. La vie sociale !

Propos recueillis par Patrick Chompré

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