Plus de 3 mois ! C’est le temps qu’il aura fallu pour que les précieuses carottes marines prélevées lors de la mission rejoignent la carothèque du LSCE (Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement) à Gif-sur-Yvette.
Partie de Recife sur le Marion Dufresne, la cargaison a rejoint la Réunion, destination du navire, puis le Havre. Enfin ce matin du 9 octobre 2023 après 3 mois de pérégrinations, le très attendu camion qui la transporte surgit derrière le château du CNRS. Nous sommes une quinzaine, scientifiques, étudiants et deux journalistes, à le guetter, prêts à décharger et ranger 520 sections de carottes ainsi que diverses caisses de matériel.
Nous voici dans les caves du château de Button, propriété du CNRS depuis 1946. C’est ici que se trouve la “carothèque“ du LSCE, destination finale de nos prélèvements.
Pourquoi ici précisément ? L’histoire commence dans les années 1960 au lancement de cette nouvelle discipline qu’est alors la paléocéanographie. Les scientifiques décident à cette époque de stocker les premières carottes dans ces caves en raison des conditions naturelles qui y règnent : température oscillant entre 11 et 15 degrés, hygrométrie constante de 80°. “Exactement ce qu’il faut pour bien conserver les prélèvements” détaille Camille Wandres ingénieure, “on peut ouvrir des carottes 30 ou 40 ans après leur rangement ici, si elles ont été bien emballées elles sont parfaitement utilisables pour la recherche”. On repense alors à ces longues heures de manutention minutieuse consacrées à l’emballage des sections à bord du Marion Dufresne.
Autour de nous sur 800m2, des étagères chargées de sections de sédiments en provenance des océans et des lacs du monde entier … et même des égouts de Paris ! “C’est précieux” poursuit Camille, “il y a beaucoup d’endroits dans le monde où il est compliqué voire impossible de refaire des prélèvements à cause de la situation politique par exemple, sans compter les coûts d’une campagne océanographique”. D’où l’importance d’une bonne conservation de ces matériaux.
Commence alors le déchargement des sections. Chacune est répertoriée, transportée et finalement rangée soigneusement à l’endroit prévu sur les étagères. Quatre heures après, mission accomplie même si nous ne sentons plus tellement nos bras !
Pour Aline Govin, la cheffe française de la mission, c’est un vrai soulagement de voir que cette ambitieuse campagne a porté ses fruits et qu’elle se termine bien. “Mais attention“ prévient-elle, “c’est la fin de la campagne mais c’est le début d’une longue séquence de travail analytique en laboratoire !”
De fait, les scientifiques aussi bien brésiliens que français sont en train de lancer leurs projets d’études et de se coordonner. Et dès demain, des sections de carottes seront emmenées au LSCE pour les premières analyses. Le début d’une autre histoire.
Patrick Chompré