Étonnant de voir qu’à l’heure des messageries instantanées et des smartphones le courrier à l’ancienne fasse l’objet d’un rendez-vous aussi prisé sur le Marion Dufresne.
Si les navires dotés d’une agence postale embarquée ont disparu, il existe toujours la possibilité une fois à bord de poster du courrier. Toutes les lettres et cartes sont rassemblées ce jour à 15H dans le PC scientifique. La scène est frappante : Une douzaine de personnes, incluant le commandant, réunies autour de la table principale et procédant avec application à l’apposition des cachets. Et la réglementation en impose beaucoup : Cachet du bateau, signature du commandant, griffe postale “courrier à bord“, mention “Paquebot“. D’autres sont optionnelles : Cachet du préfet des TAAF, de la campagne océanographique…
Chacun apporte donc ses enveloppes décorées du logo de la campagne Amaryllis, contenant des cartes postales voire des lettres écrites à la main, ce qui est une exception pour beaucoup.
Cerise sur le gâteau, les timbres émis par l’administration des Terres Australes et Antarctiques Française confèrent au courrier un parfum d’aventure et d’exotisme. Ils sont d’ailleurs des produits recherchés par les philatélistes. Nous avons donc déposé notre courrier, tout en ayant en tête qu’il arrivera à destination bien après que nous soyons rentrés chez nous. Paradoxal à l’heure de l’Internet et du culte de l’instantanéité.
L’internet justement. Pour bénéficier d’une heure de réseau sur le bateau, il faut aller sur une page dédiée. Une fois arrivé sur cette page vous êtes en théorie capable de faire des opérations basiques comme lire un mail s’il n’est pas trop lourd ou consulter un site pas trop chargé en images ou vidéo. Mais si trop de passagers font comme vous au même moment, le temps d’attente pour l’affichage d’une page est si long que le plus simple est de renoncer. Ce qui nous rappelle les débuts de l’Internet, le bruit du modem en moins. Les individus hyper connectés que nous sommes pour la plupart manifestent alors des réactions d’impatience et de frustration.
Mais d’autres voix s’élèvent parfois pour rappeler qu’il y a encore quelques années, l’Internet n’était pas disponible à bord en continu. On ne disposait que de 3 créneaux par jour pour envoyer un mail, et encore, à partir d’une adresse spéciale.
Les plus anciens se souviennent aussi du temps où il était possible d’envoyer un télex ou un télégramme, une fois tous les 3 jours….
Paradoxe à nouveau : tout le monde apprécie cette impression d’être coupé du monde sur le bateau mais beaucoup souhaiteraient ardemment retrouver la fluidité et la rapidité de la communication à laquelle ils sont habitués dans leur quotidien !
Et si l’un des attraits de cette campagne en mer venait aussi du fait que les bruits du monde arrivent comme assourdis ? Qu’il nous est permis de mettre plus de temps à répondre à nos emails ? Voire de ne pas y répondre avant le retour ?
Pierre Sepulchre, directeur de recherche au CNRS, a peut etre pris un peu de distance avec ses emails mais sa spécialité, la construction des modèles numériques ne pourrait se passer du monde numérique. Retrouvez ici son interview.
Les prélèvements sont terminés mais d’autres activités occupent les participants : La cartographie des fonds marins par exemple se poursuit avec l’étude de différents monts sur le site S16.
Il faut aussi traiter les données acquises pendant toute cette campagne et terminer le rapport de campagne qui sera accessible à toute la communauté scientifique.
Du côté de la passerelle on prépare le débarquement à Recife. Il y aura aussi une visite officielle, quelques festivités… Et le baptême du passage de la ligne.