Dans quelques heures, le Marion Dufresne et ses 7500 tonnes vont rentrer dans le port de Recife et s’amarrer, tribord face au quai 6.
Une opération qui se prépare bien à l’avance, comme l’explique le Commandant Charles Souffre : “Bien avant notre arrivée, l’armateur désigne un agent local qui doit répondre à des critères d’intégrité et de fiabilité. Nous lui exprimons nos besoins et il est sensé s’occuper de tout. Spécialité brésilienne, tout doit être réglé d’avance ! “ L’agent prend en charge les formalités d’immigration, de douane, les demandes particulières en eau, gasoil, et pour notre cas le débarquement des carottes de sédiments à destination des scientifiques brésiliens. Deux semaines à l’avance il a fallu lui envoyer toute une liste de documents parmi lesquels : Certificat de navigabilité, de sécurité, polices d’assurance, caractéristiques techniques, capacités de stockage du navire, des poubelles et bien d’autres. Les poubelles – triées – justement, seront débarquées ainsi que les déchets qui ne peuvent pas être traités à bord comme les eaux huileuses, les fonds de calle.
Pour le ravitaillement, c’est le shiplandler qui prend le relais. Cet intermédiaire a pignon sur le port, c’est à lui que la commande des produits frais, fruits, légumes, viande, poisson est transmise. “Là aussi, nous avons besoin de quelqu’un de fiable“ reprend le commandant. “On enchaîne avec 3 semaines de mer, pas question de manquer de quoi ce soit ! A Paramaribo par exemple nous n’avons pas eu tout ce que nous souhaitions mais le shiplandler a pu remplacer certains produits et nous n’avons pas manqué de frais“.
Enfin il y aura l’arrivée proprement dite. Lorsque nous serons à 2 miles nautiques, un pilote montera à bord pour prendre la passerelle avec le commandant. “Cela peut arriver qu’il ne soit pas à la hauteur“ reprend celui-ci, “mais généralement ça se passe bien, il fait ça tous les jours, il connait bien le port“.
Les manœuvres d’entrée et de sortie des ports font d’ailleurs l’objet d’appréciations de la part des spécialistes : “À la Barbade nous avons eu une très belle manœuvre, le port avait un angle, le vent nous faisait reculer, ce n’était pas facile, il y a longtemps que je n’avais pas vu une manœuvre aussi bien réalisée ! “
Renseignements pris, le port de Recife est assez ouvert, avec une grande digue, nous devrions approcher avec un léger angle, tous les lieutenants et matelots seront à leur poste pour envoyer les différentes amarres, pointes, gardes et traversières.
Hier soir, des sons de guitares mêlées à des chants proviennent de l’étage C, l’étage de l’équipage malgache. Invité, à rentrer dans le carré, magnétophone à la main, je m’assoie et assiste à la fête improvisée. La guitare électrique est tenue par le matelot Langelot. Tout le monde reprend en chœur les refrains de l’île de l’océan indien. Retrouvez ici l’interview de Jean-Nonat, bosco sur le Marion Dufresne depuis 2008.
16h30 : Impossible d’y échapper, nous sommes convoqués par le Procureur des océans. Nous recevons donc le baptême du passage de la ligne en bonne et due forme. Ayant promis au Procureur que nous ne divulguerions pas le contenu de la cérémonie, je m’en tiendrai à dire qu’elle était intense. Quoiqu’il en soit nous avons désormais un certificat de baptême qu’il suffira de montrer la prochaine fois que nous franchirons la ligne de l’Equateur sur un navire. À conserver précieusement.
La journée se termine par un barbecue festif sur le pont arrière et sous les étoiles. Au beau milieu de la soirée, un poisson réussit l’exploit d’atterrir sur le pont, pourtant situé à 6 bons mètres au-dessus de l’eau. On imagine sa surprise au contact des lumières et de la musique caribéenne diffusée par la sono. À peine le temps d’en profiter, nous l’avons rendu à son élément. Quel voyage !